En venant s’installer en Bretagne, Régine Quéva est tombée dans la marmite des algues et n’a jamais eu envie d’en sortir ! Point de départ d’une quête de démocratisation de l’algue dans nos assiettes, Régine explore le potentiel de l’algue pour nos palais et partage son enthousiasme à travers ses livres et ses ateliers de cuisine et de cosmétiques aux algues notamment.

Dans cet entretien d’octobre 2012, écoutez Régine décrire sa rencontre avec l’algue, cet « élément en lien avec la terre, l’eau et le ciel ». Depuis, que de développements avec la publication de guides, la création de la consoeurerie des croqueuses d’algues et le site Food’algues à venir très bientôt !

Découvrez tout le chemin parcouru et les actualité de Régine dans la section « Quoi de neuf ? ».

Parcours

Je suis Régine Quéva. J’ai un parcours d’animatrice auprès des enfants, de formatrice et d’enseignante. J’ai été enseignante-directrice d’école. J’aime beaucoup la maternelle, les petits. Et ensuite je me suis tournée vers l’édition : l’édition scolaire dans un premier temps et puis l’édition en tant qu’éditrice et puis l’édition en tant qu’auteur. Donc j’ai publié beaucoup de livres : des livres destinés aux enfants, aux parents, aux enseignants,… Et puis ensuite des livres de vulgarisation scientifique. J’ai une très bonne culture scientifique, je me suis toujours intéressée à la nature. J’ai commencé par m’intéresser aux étoiles : quand j’ai appris le concept de la vitesse de la lumière ça m’a bouleversée ! Je me souviens du jour, de l’heure, du moment, de l’endroit où ça s’est produit et ça s’est inscrit en moi de manière définitive et irréversible. Ca a été une entrée dans la nature, moi qui aimait toujours ça, qui a été une entrée importante parce que je me suis beaucoup documentée. J’ai beaucoup lu et j’ai pu ensuite écrire en vulgarisant avec le côté enseignante que j’ai, expliquer à des petits des choses complexes, ça m’a permis d’écrire des livres scientifiques.

La rencontre avec les algues

Ensuite ma vie m’a amenée en Bretagne et là j’ai eu un deuxième choc qui a été l’océan, la grève mais plus exactement l’estran. J’ai découvert la pêche à pied, j’ai adoré ça ! J’ai eu l’impression d’être au paradis. Ca a été extraordinaire pour moi, et cet estran m’a amenée à m’intéresser aux algues. J’ai vu un jour un stage, une sortie algues. Je m’y suis inscrite et ce qui m’intéressait c’était “algues et cuisine”. J’adore cuisiner, je suis passionnée par la nutrition, par la santé, par tous les éléments de la nature comme je l’ai dit tout à l’heure, et là tout à coup j’ai découvert un élément magnifique qui était la synthèse de tout c’est à dire, la nature, l’eau, la santé et la nutrition, la gastronomie. En découvrant cet élément, je me suis dit qu’il y avait quelque chose de fabuleux à trouver, à poursuivre. J’ai eu l’impression de découvrir un élément méconnu. J’ai vu quelqu’un faire des plats, etc. Mais je me suis dit “il y a plus à trouver, il y a plus à chercher”. Et là j’ai commencé une quête. Vraiment, véritablement une quête qui n’est pas prêt de s’arrêter. Ca m’a surtout amenée à ce que je fais aujourd’hui qui est les ateliers.

Les ateliers

Je fais des ateliers de cuisine aux algues, de cosmétique autour des algues mais surtout cuisine aux algues. Mon but c’est d’apprendre aux gens à cuisiner les algues, c’est à dire à les découvrir et à se les approprier de manière naturelle et évidente. Non pas dans une cuisine asiatique, parce que la cuisine asiatique elle est bien en Asie, elle est bien quand on a la culture asiatique, elle est bien quand on a une constitution asiatique. Elle est aussi bien dans les grandes villes parce que les grandes villes comme Paris sont très ouvertes à la cuisine asiatique. Ici en Bretagne, on va cultiver, on va s’occuper des algues avec une cuisine française bretonne, avec des produits bretons et avec des produits du terroir. C’est ça qui va m’intéresser et c’est ça qui intéresse les gens. Le jour où j’ai découvert la cuisine aux algues, je me suis rendue compte que j’ai découvert quelque chose qui représente la synthèse de ma vie : à la fois les sciences, à la fois la nature, l’amour des beaux paysages et puis le bien-manger et le manger sain !. Donc ça c’est quelque chose qui me passionne aujourd’hui et que je suis en train de développer complètement.

Demain les algues ?

Pour moi si je devais dire une chose importante concernant les algues, évidemment peut-être que je vais dire quelque chose qu’on entende depuis trente ans mais pour moi c’est sûr que les algues c’est l’avenir. C’est un mot qui revient systématiquement et pas seulement dans ma bouche mais dans la bouche des gens qui viennent aux ateliers et qui le disent. Il est évident que les algues c’est l’avenir. D’un point de vue des biocarburants, c’est évident quand on voit les terres massacrées, utilisées, de la nourriture utilisée pour des moteurs, c’est quand même aberrant. Quand on voit aussi toutes les élevages industriels, tous les élevages d’animaux pour des protéines alors que les algues ont des protéines, je trouve que c’est un gâchis immense qui est sur notre terre. A ce titre là, l’algue nous rendra service : elle est plongée dans une eau qui est une eau de qualité les 3/4 du temps, qui est une eau riche de plein d’oligoéléments. Elle se nourrit de cette eau, elle nous en offre le meilleur concentré, elle se nourrit du soleil par la photosynthèse, quand on mange des algues on mange du soleil et de l’eau de mer. Comment ne pas penser que c’est la nourriture d’avenir et comment ne pas penser que c’est un élément d’avenir ? Il faut vraiment être aveugle pour ne pas voir ça et pour moi c’est une évidence qui s’impose à tous.

Quand l’image de l’algue est négative…

Evidemment on peut penser aujourd’hui en 2012, ou même en 2000, ou même en 2020 que les algues ça n’a aucun intérêt, on glisse dessus, c’est nul, ça sert à rien. Ca on le pense quand on a perdu le lien avec la nature, ça c’est clair. Il est à peu près qu’il y a quelques milliers d’années quand on avait un lien fort avec la nature, on goûtait, on se penchait, on cherchait tout ce qu’on pouvait faire avec les produits naturels, avec des éléments naturels, et il est à peu près certain que les peuplades qui ont vécu il y a 5000 ou 6000 ans au bord de l’eau ont eu eux cette curiosité, ont eu eux cette possibilité de se dire “mais qu’est ce que je peux en faire ?” à la fois d’un point de vue plastique, d’un point de vu esthétique et aussi d’un point de vue du matériau, et évidemment du point de vue de la nutrition. Et ce jour là ils ont croqué dans les algues et ils se sont dit “tiens d’abord j’en meurs pas, d’abord ça me donne aucun mal, au contraire, ça me régule ceci, je me sens mieux, etc.” Et ils ont très certainement trouvé des façons de les accommoder que nous avons perdues. Il faut qu’on retrouve ce lien à la terre. Ce lien à la terre c’est aussi un lien spirituel. C’est à dire c’est un lien à la terre et au ciel. C’est à dire nous l’homme, la femme on est au milieu de ces éléments et on doit pour être en équilibre, être en lien avec le ciel, la terre et l’eau. L’algue elle est emblématique pour moi et c’est pour ça que ça me touche évidemment parce que l’algue elle nous remet à la terre, elle nous remet à l’eau et elle nous remet quelque part dans un lien avec le cosmos. Je vais être un petit peu excessive peut-être mais je crois qu’un certain nombre de gens vont comprendre ce que je vais dire. En reprenant cet élément là, on se remet dans la boucle et on fait partie du tout.

Pour plus d’informations

www.reginequeva.fr